Accouchement à la maison : conditions et précautions à prendre

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L’accouchement à domicile (AAD) représente 90% des naissances dans le monde. Officiellement il n’est pas interdit en France, mais en réalité, tout est fait pour décourager les mamans de faire ce choix.

Accouchement à la maison : qui est concerné ?

En France, 1 % des naissances, soit 8 200 bébés, se seraient déroulés à domicile en 2008. Mais la demande d’accouchement à la maison serait bien plus importante :  » certains professionnels l’estiment entre 3% et 5% des grossesses, d’autres, comme le collectif Évolutionnaire AAD, affirment que 25 % des Françaises sont désireuses d’accoucher chez elles « , affirmait Delphine de Mallevoüe dans le Figaro en octobre 2008.

Quoi qu’il en soit, toutes les demandes sont loin d’être satisfaites. Pour des raisons médicales bien sûr (aucune complication que ce soit n’est acceptée pour un AAD – grossesse gémellaire, position en siège, utérus retro-placentaire, hypertension… – ), mais aussi et surtout à cause de la pénurie de sages-femmes pratiquant l’accouchement à la maison.

En effet, les sages-femmes libérales accouchant à domicile ne sont qu’une soixantaine en France. Un chiffre qui s’explique par les conditions particulièrement difficiles dans lesquelles elles exercent : tarifs des assurances professionnelles prohibitifs (15 à 20000 € par an), ce qui les place dans une situation illégale (l’assurance est obligatoire mais elles ne peuvent se la permettre), tarif sécu des consultations trop bas (15,90 €), comme le remboursement de l’accouchement à domicile (312 €, alors qu’un accouchement en structure coûte au minimum 3000 € !).

Enfin, les autorités médicales sont tout à fait hostiles à cette pratique, en particulier les gynécologues obstétriciens qui redoutent, comme pour le projet des maisons de naissance, de recueillir les transferts quand ça se passe mal mais qui souhaitent garder en même temps le privilège de s’occuper de toutes les naissances, mêmes physiologiques…

Aujourd’hui, par défaut de sages-femmes pour les accompagner dans leur choix, certaines futures mamans prennent le risque d’accoucher seules à la maison. Si la plupart des demandeuses d’AAD ne vont pas aussi loin, reste leur incompréhension devant la situation française, alors que le choix de l’accouchement à domicile est admis dans les pays voisins, voire même la norme pour toute grossesse normale comme aux Pays-Bas (là-bas, 30% des accouchements ont lieu à domicile).

Pourquoi choisit-on d’accoucher à la maison ?

Avant tout, les parents et en particulier les mamans ont la volonté de se réapproprier la naissance de leur enfant. Ils ne veulent pas ou plus être rendus « objets » ou encore « déresponsabilisés » par le corps médical.

Le désir du père de s’impliquer dans l’accouchement et dans la préparation de celui-ci joue également dans le choix d’un AAD, tout comme le besoin pour leurs femmes de se sentir en confiance, dans la chaleur et l’intimité de leur foyer, pour « travailler » en paix. Elles recherchent aussi la liberté de pouvoir se déplacer, s’alimenter et de choisir les positions d’accouchement qui leur conviennent, éventuellement dans l’eau.

Il revient à la sage-femme d’apprécier ces motivations avant de se lancer – ou pas – dans un tel projet avec les parents. L’Association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL) précise que « toute sage-femme doit, avant de s’engager dans une naissance à domicile, avoir analysé l’ensemble de la situation dans ses composantes médicales (physique et psychique), familiale et sociale. Il est essentiel que puisse s’établir une relation de confiance partagée. A chaque couple qui en fait la demande, elle devra donner une information impartiale et claire sur leur choix, définir son champ de compétence et indiquer les limites de son exercice ».

L’accouchement à domicile : en pratique, comment ça se passe ?

 Une fois que la sage-femme a défini pour les parents les limites de ses compétences et que ceux-ci ont accepté les conditions d’un accouchement à la maison, une série de rencontres sera nécessaire pour la préparation à l’accouchement. Aspects physiologiques, organisation pratique : grâce à l’accompagnement global, un maximum de questions sont abordées avant le jour J (qui garde les autres enfants quand il y en a, où s’installer dans la maison, que faire en attendant la sage-femme, quel geste technique va-t-elle effectuer…).

La sage-femme insiste aussi sur l’importance de l’accouchement en lui-même et non sur le lieu de l’accouchement, pour prévenir au mieux la déception des parents qui devraient être transférés au dernier moment à l’hôpital. En fin de grossesse, un dossier est d’ailleurs toujours constitué « au cas où » dans une maternité proche, représentant une consultation au 8e et au 9e mois et la consultation d’anesthésie. 

Dès que le travail commence, de jour comme de nuit, la sage-femme arrive avec son matériel (tout le nécessaire de réanimation si besoin). La maison a été ou est préparée selon les critères des parents : lumière tamisée, musique douce, bougies ou feu de cheminée, encas et boissons préparées, les plus grands enfants tranquilles chez leur mémé.

Un accouchement à domicile est extrêment respectueux de la physiologie de l’accouchement et de l’intimité de la parturiente : on exclut ainsi les touchers vaginaux répétés, le perçage de la poche des eaux, l’épisiotomie, la perfusion d’ocytociques, le monitoring en continu ou intermittent mais trop long et fréquent et l’expression abdominale. Est exclue aussi, de fait, l’anesthésie péridurale…  Mais la préparation préalable a montré à la mère comment s’en passer et compagnon et sage-femme vont l’aider à y arriver. 

Une fois le bébé né, il n’aura son cordon coupé que lorsqu’il ne bat plus, il sera maintenu contre sa mère en peau à peau sans être immédiatement lavé ni aspiré puis sera mis au sein à volonté. Une belle façon de venir au monde !

Pratiquer l’accouchement à la maison : une vocation

 

Une sage-femme qui pratique l’accompagnement global et l’accouchement à domicile doit être d’une disponibilité totale : elle peut avoir à rejoindre très vite une maman qui, peut être, n’accouchera que dans 5,10 ou 24 heures. Mais celles qui pratiquent assurent que le jeu en vaut la chandelle. Leur travail avec la future mère et la famille en général n’a rien de comparable avec ce qui se fait à l’hôpital : beaucoup plus humain, plus respectueux, plus physiologique. Quand on sait combien la qualité du suivi de grossesse et d’accouchement joue sur l’éventualité d’une dépression post-partum et le bon établissement du lien mère-enfant, ça compte !

Si les médecins et notamment le Conseil national des gynécologues-obstétriciens de France semblent sensibles à l’intérêt d’un accompagnement global de la future maman, les maternités ne sont pourtant que très peu nombreuses à permettre l’accès de leurs plateaux techniques aux sages-femmes libérales. Du coup, des femmes qui ont fait tout leur suivi avec une personne peuvent se retrouver à accoucher avec une autre. Et le stress occasionné peut engendrer des complications !

Accoucher à la maison : attention à la pénurie de sage-femmes

En France, l’argument principal des assureurs comme des médecins est que l’accouchement à la maison serait plus dangereux qu’un accouchement en structure hospitalière. Or des études comparées sur le taux de mortalité maternelles et infantiles avec les pays voisins pratiquant l’AAD ont démontré qu’il n’en était rien.

Reste la volonté politique, or aujourd’hui le ministère de la Santé estime que c’est aux sages-femmes elles-mêmes de régler leur problème d’assurance. Il ne veut surtout pas promouvoir indirectement les accouchements à domicile. Pour s’en sortir, les sages-femmes pratiquant le suivi global et l’AAD sont souvent obligées de demander des dépassements d’honoraires. « Au final, les familles déboursent parfois jusqu’à 1500 € pour avoir accès à un AAD ! » dénoncle le collectif « Naïtre chez Soi ».

Si, pour une raison ou pour une autre, la maman qui a choisi un accouchement à domicile doit être transférée au dernier moment en structure hospitalière, la sage-femme qui la suit n’est pas sûre d’avoir accès au plateau technique. Au pire, elle peut même être assignée en justice par tel ou tel praticien contrarié qu’une femme arrive en urgence, non formatée par son équipe et la préparation propre à sa structure.  La peur de la plainte en justice est un frein important à la pratique de l’accouchement à la maison par les sages-femmes.  

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